Et jamais je n'ai vu autant de misères, de souffrances et de solitudes que dans la vie quotidienne.
L'écart entre nos illusions et notre réalité est ahurissante. Cela explique sans doute l'amertume qui nous habite.
Je vous cite un vieil extrait tiré de la préface de Henry Miller à son roman Tropique du Capricorne. Ce qu'il a dit dans ces lignes - en 1972, alors qu'il venait de passer le cap de ses 80 ans - est toujours aussi vrai aujourd'hui. L'Homme trébuche constamment sur le fantasme de la perfection au lieu de se contenter d'être seulement lui-même. Être soi-même, en fait, est un véritable miracle. Pourquoi demander davantage?
Ce qui m'a amené à cet extrait, c'est après avoir vu quelques minutes d'un documentaire sur la supercherie de Lance Armstrong. La dope qu'il a prise pour gagner de prestigieux titres en cyclisme pendant les années de ses succès continus. Et Dieu sait à quel point on nous l'a présenté comme un exemple à suivre.
J'irais plus loin: quand bien même il n'aurait pas été dopé, je me demande s'il aurait dû être présenté comme un modèle à suivre. J'en doute. La perfection au prix de la douleur extrême, cela relève du ridicule.
Voilà ce qu'en disait sagement Henry Miller:
Pour que l'on comprenne bien ce que j'entends par cette simplicité, je dirai encore ceci: nous ne vivons pas à coups de chef-d'oeuvre, ni à travers des chefs-d'oeuvre, ni à cause de chefs-d'oeuvre. Nous sommes beaucoup plus chargés de sens lorsque nous babillons comme l'enfant que lorsque nous nous comportons en monstres d'intelligence. Nous n'avons plus besoin des exercices de gymnastique qu'exige la fréquentation des chefs-d'oeuvre. Il y a beau temps que les maîtres eux-mêmes y ont renoncé; beau temps qu'ils se sont envolés de la cage. Mais nous, idiots que nous sommes, nous nous entêtons à ramper dans la coquille vide, comme de pauvres escargots perdus et abandonnés.
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